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Favoriser les ponts et les passerelles entre dirigeants pour que ces derniers puissent échanger, débattre et confronter leurs méthodes et leurs idées : c’est l’ADN de CEPI Management depuis 70 ans. Un leitmotiv pour former et accompagner les dirigeants au plus près de leurs besoins de répondre agilement et efficacement aux enjeux contemporains du monde de l’entreprise. Dans cette perspective, CEPI Management, accompagné de Boost Us, tient chaque trimestre un sharing lunch au Manoir de Marcq. Un moment d’échanges, de convivialité et de partage entre dirigeants issus de secteurs pluriels et d’horizons multiples. Pour ce premier rendez-vous de l’année 2023, Guillaume Debrosse, Marc Burden, Caroline Traisnel, Laurent Pietraszewski et François Vandenbussche ont ainsi pu débattre et discuter de la notion stratégique de la conduite du changement.
Mission impossible ? Parce qu’il génère de l’inconnu et de l’incertitude, le changement peut inhiber, irriter et engendrer une levée de boucliers au cœur de l’entreprise s’il n’est pas ou mal anticipé et envisagé. L’humain semble autant exalté qu’effrayé par le changement. Un enjeu d’autant plus prégnant et saillant que le premier quart de siècle que nous vivons est marqué par les crises, les mutations et les ruptures qui obligent les organisations et les Hommes à évoluer et se transformer sous peine de décliner, voire de disparaître.
Plus vite. Encore plus vite. Toujours plus vite. Notre rythme de vie et nos prises de décisions se sont accélérés. Le moment charnière ? La survenue de la crise Covid au printemps 2020. « Le Covid constitue un point de bascule majeur dans la vie de l’entreprise et peut être considéré comme une chance incroyable dans l’optique de la conduite du changement puisque la pandémie soudaine nous a obligé à agir vite et à construire de nouveaux modèles, témoigne Guillaume Debrosse, directeur général de Bonduelle. C’est aussi un moment qui nous a permis d’instaurer plus d’humain au cœur de nos pratiques. Aujourd’hui, je passe plus de 20% de mon temps à gérer des problématiques de ressources humaines ». Un constat partagé par Caroline Traisnel, PDG de Reset&Match : « Le Covid nous a permis, contraints et forcés, d’adopter la conduite du changement. Nous sommes depuis forcés à la nécessité de conjuguer l’agilité permanente ». Manifestement derrière nous, la menace pandémique nous a placés devant nos forces et faiblesses, et, surtout, face à nos responsabilités.
Guerre en Ukraine, incertitudes géopolitiques, crise climatique, mutations technologiques, engagement des salariés… Le Covid est loin d’être le seul élément perturbateur de la vie des entreprises. Face à ces enjeux et soubresauts multiples, la conduite du changement est ainsi devenue un exercice impératif et quasi quotidien depuis trois ans maintenant. « Nous vivons une accélération de la mutation des emplois et de l’organisation des métiers. Cela nécessite une adaptation quasi permanente, souligne Marc Burden, directeur du Réseau Entreprendre Nord. Pour faire adhérer, il est indispensable de manager la gestion des talents. Il y a une nécessité de développer encore plus l’intelligence collective et de manifester un intérêt pour la prospective, d’imaginer le monde de demain pour ne pas être dépassé lorsque celui-ci adviendra ». Penser l’avenir pour ne pas devenir obsolète, tel est le crédo à adopter. Fort de son passage par la case politique, Laurent Pietraszewski, dirigeant du cabinet de conseil GRENEL, esquisse lui aussi un regard attentif sur ces questionnements : « L’enjeu majeur pour les entreprises aujourd’hui est de comprendre l’individu et de transformer le citoyen désabusé en salarié engagé. Cela nécessite un profond ajustement en termes de pensée d’entreprise. Investir dans la dimension managériale est essentielle. L’entreprise aujourd’hui doit raconter une histoire pour faire adhérer », conseille-t-il avec émulation.
Adapter le message à l’ensemble de l’entreprise est un réel défi. . Il nous faut développer la culture du feedback, et ce dans les deux sens
Pour une conduite du changement réussie, opérante et efficiente, il ne faut pas se disperser et veiller à partir du terrain et du quotidien de l’entreprise. Pour ce faire, éluder les envies et besoins des collaborateurs seraient aujourd’hui une hérésie. S’intéresser aux attentes des salariés est primordial et crucial. Les dirigeants en sont parfaitement conscients. « Adapter le message à l’ensemble de l’entreprise est un réel défi. Il nous faut développer la culture du feedback, et ce dans les deux sens. Tout le monde peut avoir quelque chose à dire et avoir voix au chapitre. Chacun doit sortir de son job et être exposé à d’autres réalités. Travailler ensemble quels que soient les métiers : c’est un bel objectif collectif autant qu’un impératif », relève Guillaume Debrosse. Sortir de sa zone de confort, solliciter l’intelligence collective, apprendre et challenger… Les méthodes ne manquent pas. Encore faut-il l’adhésion du plus grand nombre. Car le salarié d’aujourd’hui n’est pas celui d’hier. Son nouveau crédo ? Servir mais aussi et surtout recueillir. Le collaborateur du XXIe siècle est plus que jamais attentif aux attitudes et aux gestes de son employeur. « Le salarié veut de la réciprocité : il veut bien donner mais entend surtout recevoir. Il y a de l’équilibre et une bonne intelligence à trouver. La pression est forte sur les managers au quotidien. Au-delà du contrat de travail, l’entreprise doit signer un contrat moral avec le salarié pour l’emmener dans ses missions. Un supplément d’âme et de valeurs est à trouver », note avec rigueur et enthousiasme Laurent Pietraszewski.
Au-delà de leurs missions quotidiennes et des postes qu’ils occupent, les collaborateurs comme les potentielles recrues attachent une importance prépondérante au rôle joué par l’entreprise au cœur de la société et son influence positive sur les conjonctures économiques, sociales et environnementales. « Bien plus que du poste et des tâches à effectuer, on parle désormais du projet de l’entreprise dans la société pour attirer et faire adhérer. Tous les maillons de l’entreprise sont essentiels, le sens du collectif prend toute sa signification. Il faut inlassablement accompagner les salariés et les former pour qu’ils soient efficients dans leur management. S’attacher au bien-être et au bien-vivre ensemble de ses équipes est indispensable », analyse de son côté François Vandenbussche, Directeur général de Cèdres Industries, particulièrement mis à contribution durant la période Covid.
Nous vivons ainsi une confrontation de générations et un véritable choc des cultures
Quête de sens, qualité de vie au travail, reconnaissance sociale, exigences climatiques… En plus d’apporter une attention particulière aux attentes et ambitions de ses salariés, l’entreprise est également aux prises avec plusieurs générations de salariés qui ne s’entendent ou ne se comprennent pas toujours aisément. Faire cohabiter mais surtout manager, accompagner et entraîner nombre de générations et de personnalités qui en découlent relève parfois du casse-tête et du travail d’orfèvre. « Le maillage entre juniors et seniors constitue la juste équation. Chacun peut œuvrer dans sa zone de compétences et proportionnellement à sa capacité d’action, rassure d’emblée Caroline Traisnel. Le groupe Ciuch, par l’intermédiaire du formidable travail mené par son dirigeant Francis Ciuch, est un exemple en matière d’adéquation et de complémentarité générationnelle ». La force de l’exemple et l’acceptation de la différence : sans doute réside-t-il ici le début d’une cohabitation rigoureuse à même d’accoucher d’une collaboration fructueuse.
Fin stratège, le dirigeant se voit bientôt invité à parfaire ses connaissances en psychologie, en sociologie et en philosophie pour entendre et comprendre l’ensemble des forces vives qui composent son entreprise. « La compréhension des nouvelles générations est un enjeu profond et complexe. Je ressens parfois une incapacité à envisager collectivement le long-terme et à se projeter. Nous vivons ainsi une confrontation de générations et un véritable choc des cultures, témoigne avec délicatesse François Vandenbussche. Attirer les talents est devenu complexe et périlleux. Il nous faut être innovant, oser et créer pour attirer les collaborateurs et les rendre fiers et acteurs. Aujourd’hui, le salarié est focalisé sur le bien-être et le résultat à court-terme. L’entreprise doit le comprendre et être moteur de l’accompagnement du changement ».
Mais alors quels sujets seraient en mesure de rassembler toute l’entreprise et ses générations hétéroclites et composites. La santé ? C’est le souhait affirmé affiché par Laurent Pietraszewski : « Je suis convaincu que l’entreprise va devenir un nouveau territoire de santé : quels services j’offre à mon salarié pour qu’il soit fier de bosser pour moi et en parle à son entourage ? C’est une formidable question à se poser pour faciliter la vie du salarié et en faire un ambassadeur. Il faut aller au-delà de ce qu’attend le salarié, le surprendre positivement et prendre soin de lui », suggère-t-il avec entrain. Le champ des possibles en matière d’avantages et de marqueurs de différenciations est vaste. L’entreprise est invitée à imaginer et (co)construire le terrain d’un rassemblement commun.
L’entrepreneur est aujourd’hui l’acteur clé de la transition et de la transformation
Dans ce contexte aussi exigeant que stimulant, le dirigeant est attendu au tournant et détient un rôle prépondérant. Son implication, son exemplarité et sa vision claire sont précieuses. Plus que jamais, il endosse le costume de capitaine à bord, quels que soient les vents et les marées. Il sait où il va et sait entraîner les autres avec lui. « L’entrepreneur est aujourd’hui l’acteur clé de la transition et de la transformation. C’est l’ambassadeur du changement, pointe Marc Burden. Challenger notre vision, cette « étoile polaire » qui doit nous guider et nous animer est une belle ambition. Être en permanence en pleine réflexion sur l’avenir de l’entreprise est un réflexe à adopter ».
Croire dans le chemin que l’on trace, vouloir que ce tracé inspire et puisse esquisser un futur vertueux : voilà un leitmotiv porteur d’espoirs. « Nous nous devons d’avoir une influence positive sur la société grâce aux valeurs que nous transmettons et que nous conjuguons. La question fondamentale aujourd’hui est celle du sens : pourquoi je travaille ? L’adéquation entre le temps personnel et le temps professionnel est devenue essentielle. L’entreprise doit aller chercher les talents pour se réaliser. Il faut encore et encore se questionner sur la place de l’Homme au cœur de la société, et c’est une excellente chose », expose Guillaume Debrosse.
La souplesse de vue et d’action est également une manière d’être et de faire qui peut porter ses fruits. « Être dans la sincérité et l’authenticité, vivre les choses. Être dans la pratique plus que dans la théorie. Le dirigeant ne doit pas être clivant mais être dans une posture d’ouverture. Dépassons le cadre pour faire bouger les lignes et rester dans l’agilité », propose pour sa part Caroline Traisnel. Le dirigeant est aussi celui qui prend des décisions qui marquent et portent. Il nous invite à avoir confiance et œuvrer sans temporiser lorsque passion et conviction nous animent. « Il ne faut pas hésiter à aller vite quand on croit à ses idées. Il ne faut pas avoir peur avant d’entreprendre, tout est possible quand on décide de placer l’homme au centre », suggère avec élan François Vandenbussche.
Qu’importe les sujets, leurs horizons et leur personnalité, nos dirigeants attablés manifestent une même passion sincère et engagée pour leur entreprise et leurs projets. Une même volonté spontanée et affirmée de s’attacher à la satisfaction et à l’émancipation de leurs collaborateurs. Une même envie généreuse de s’appliquer et de s’impliquer encore davantage demain. Pour adopter et adapter une conduite du changement devenue globale et en faire une opportunité bien plus qu’une menace.
Dernière vertu du dirigeant ? Savoir prendre le temps du recul pour échanger avec ses pairs et se nourrir de moments de partages sincères. Horizon, Oxygène, Curiosité, Ouverture, Partage : ce sont les mots retenus par nos dirigeants pour résumer leurs échanges et ces instants de dialogues aussi naturels qu’essentiels, porteurs de valeurs et générateurs d’inspiration.
Dirigeants présents à notre sharing lunch du 3 février 2023
Guillaume Debrosse, Directeur général Bonduelle
Marc Burden, Directeur Réseau Entreprendre Nord
Caroline Traisnel, Directrice générale Reset&Match
Laurent Pietraszewski, Directeur-Fondateur cabinet Grenel
François Vandenbussche, Directeur général Cèdres Industries
Eric Gourdin, Directeur général adjoint CEPI Management
Quentin Druart, Directeur Boost Us
Victor Mollet, Directeur de la Communication CEPI Management